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Interview sur l'impact de la covid-19 sur les DSSR

Dernière mise à jour : 18 juin 2020


Interview du coordonnateur de l’association avenir Nepad Congo le Dr. Ngodi Etanislas, sur la question de l’impact de la covid-19 sur la santé sexuelle et reproductive des femmes

Question potentielle : Pourriez-vous faire une brève présentation de votre organisation ?

Réponse

L’Association Avenir NEPAD Congo est une association sans but lucratif œuvrant dans le domaine de l’appui au développement communautaire. Elle a été créée le 30 janvier 2004 à Brazzaville et a reçu son agrément officiel le 9 mai 2005. Elle œuvre en faveur de la protection des droits humains et de la promotion de la gouvernance. La mission principale de l’organisation est de contribuer à la promotion et la défense des droits humains, de la paix et de la construction d’un État de droit durable et soucieuse du respect intégral des valeurs humaines, universellement reconnues. Ces dix dernières années, l’organisation a développé un programme à la faveur duquel, plusieurs projets ont été exécutés sur la lutte contre les violences basées sur le genre, et la promotion des droits, la santé sexuelles et reproductive.

A cet titre, je tiens à vous signaler que notre association est est dotée du statut consultatif spécial de l’ECOSOC depuis juin 2018 et participe aux activités de la Commission conditions féminines sous le leadership de UNWOMEN et bénéficie de l’appui de ses partenaires financiers dont AmplifyChange, UN Women, le Haut- Commissariat des Nations-Unies pour les Droits de l’Homme, le Réseau MAMA, le Ministère en charge de la promotion de la femme et bien d’autres.

Question potentielle : Etant donné que les questions des droits, la santé sexuelle et reproductive vous intéressent, pourriez-vous nous éclairer les problèmes de la santé sexuelle et reproductive auxquels sont confrontées les femmes et filles ?

Réponse

Nous pouvons dire que les congolaises et les congolais sont confrontés à plusieurs problèmes liées à la jouissance de leurs droits sexuels et reproductifs. Cela impacte négativement sur la santé.

En effet, en parlant de la santé maternelle, on se rend compte que le ratio de mortalité maternelle, malgré le fait qu’il a baissé ces dernières années, reste encore élevé car il est de 436 décès maternels pour 100.000 NV en 2015. Et il faut souligner que la tranche d’âge la plus affectée est celle des femmes âgées de 20 à 34 ans, correspondant à la période la plus active sur le plan sexuel.[1]

Pour ce qui est de la prévalence contraceptive dans notre pays, il y a lieu de souligner qu’elle est encore très faible. Selon le MICS 2014-2015, 30,1% des femmes de 15 à 49 ans mariées ou en union libre utilisent une méthode contraceptive.

Pour ce qui est des avortements, il y a lieu de souligner qu’ils se passent dans la clandestinité au regard du fait que la pratique est prohibée par la loi (Article 317 du Code pénal). Or, les résultats de l’Enquete démographique et de santé de 2012 montrent que les congolaises ont souvent recours à l’avortement, pour une raison ou une autre. Et vous savez bien que certains avortements pratiqués dans la clandestinité peuvent générer des complications ou peuvent nuire à la santé de la femme.

En ce qui concerne les violences sexuelles, il faut dire qu’elles restent préoccupantes. Selon des études réalisées par le Ministère de la Promotion de la Femme et de l’intégration de la Femme au Développement (MPFIFD) avec l’appui de l’UNICEF, ces violences ont changé de visage, les plus jeunes étant agressés par des personnes au sein des familles et dans le voisinage. Les agressions sexuelles ont constitué 2,6% des motifs de consultation aux urgences gynécologiques du CHUB de janvier 2014 en décembre 2015. Les victimes, essentiellement féminines (98% et dont l’âge moyen de 14 ans variait de 2 à 49 ans) étaient en majorité des élèves et étudiants (77,3%)[2].

Nous n’avons pas cité tous les aspects des DSSR mais le tableau que nous venons de peindre prouve à suffisance que les congolaises rencontrent des difficultés liées à l’accès aux informations, aux services de qualités adaptés aux besoins. Enfin, il faut prendre en compte le caractère restrictif de certaines dispositions juridiques qui ne favorisent pas la jouissance de certains droits.

Question potentielle : Avec la crise de la Covid-19, pensez-vous que les problèmes que vous venez de mentionner ont pris plus d’ampleur ?

Réponse :

Oui ! Je pense qu’on peut le dire. La crise mondiale actuelle résultant de la pandémie du COVID-19 a un impact direct sur l’accès des femmes et des filles aux services de santé sexuelle et génésique. Bien que les premiers rapports révèlent que plus d’hommes meurent de suite du COVID-19, la santé des femmes est généralement affectée par la réaffectation des ressources et des priorités, y compris les services de santé sexuelle et génésique. Des études montrent que même avant COVID-19, les femmes et les filles sont confrontées à de multiples obstacles dans l’accès aux informations et aux services de SSR. Cette crise de santé publique exacerbe les risques pour les femmes et les filles vivant dans des vulnérabilités croisées, en particulier dans des contextes aux systèmes économiques et sanitaires fragiles, comme notre pays le Congo, car les ressources financières, technologiques et humaines sont détournées pour répondre à la pandémie du COVID-19.

Les restrictions de mouvement imposées par les mesures de confinement ont amené un accroissement des violences sexuelles et basées sur le genre (VSBG), contribuant ainsi à une augmentation des grossesses non désirées et des avortements à risque.

Même si les personnes à risque de COVID-19 étaient des personnes âgées, des malades chroniques et immunodéprimées, l’expérience des épidémies précédentes nous montre que les urgences et les épidémies ont des impacts sexospécifiques qui affectent de manière disproportionnée les femmes, les filles et les personnes LGBTIQ+. Ils sont confrontés à des menaces accrues de violence sexuelle et d’autres formes de violence et le fait de devoir rester à la maison pendant le confinement signifie être emprisonné avec leurs agresseurs. Les personnes handicapées, les peuples autochtones, les réfugiés et les LGBTIQ+ qui sont normalement exclus du système de santé subiront davantage de discrimination car la pandémie met à rude épreuve les ressources et les services.

Pour l’association Avenir Nepad, la prestation de services de santé sexuelle et reproductive, y compris des services liés à l’avortement sans risque et à la violence sexiste, est essentielle pour garantir la santé, les droits et le bien-être des femmes et des filles. Les services et les produits de Santé Sexuelle et Reproductive ne doivent pas être négligés en ce temps de crise; les femmes doivent continuer d’avoir besoin de services complets de santé sexuelle et génésique.

Dans la plupart des pays où le confinement a été imposé, des femmes enceintes ont accouché à domicile ou en cours de route vers un établissement de santé en raison de restrictions de confinement. Ils ont manqué des rendez-vous prénatals, des rendez-vous de planification familiale, et les filles ne peuvent pas accéder aux services de soins post-avortement en raison de restrictions de mobilité.

Question potentielle : Le 28 Mai est la Journée Internationale d’Action pour la santé des femmes commémorée de diverses manières par les défenseurs des droits des femmes. Avez-vous un message particulier à adresser pour cette journée ?

Réponse :

Evidemment ! Le 28 mai arrive et en tant que défenseurs des droits sexuels et reproductifs, nous continuerons d’agir et de mener des actions pour permettre aux congolaises de jouir pleinement de leur droits sexuels et reproductifs car ces droits sont une partie indivisible et inaliénable de nos droits humains.

Maintenant, au moment où les droits humains des femmes et, en particulier, les droits sexuels et reproductifs continuent d’être systématiquement violés dans le monde, la mobilisation, à la fois au sein et au-delà de nos communautés, reste essentielle pour résister à tout recul de nos droits et faire progresser la justice sexuelle et reproductive pour tous. Comme le contexte géopolitique mondial menace de devenir de plus en plus régressif, il est plus important que jamais de dénoncer toute tentative de restreindre les droits des femmes, y compris nos droits humains, de décider librement de tous les aspects de notre corps, de notre sexualité et de notre vie, sans coercition, discrimination ou violence.

En République du Congo, l’accès des femmes aux informations et services essentiels en matière de DSSR reste essentiel pour répondre à la COVID-19. Le gouvernement devrait continuer de donner la priorité à la prestation de services essentiels de SSR aux femmes et aux filles. Toute stratégie de santé publique qui ne tient pas compte des droits de l’homme, y compris des droits à la santé sexuelle et reproductive, sera non seulement incompétente et non durable, mais créera également un environnement propice à de graves violations des droits humains.

A cet effet, j’invite les pouvoirs publics à :

1. Inclure les produits de santé reproductive tels que des articles de santé menstruelle, des contraceptifs oraux, des préservatifs, du spermicide et de la lubrification dans les colis de secours pendant la période de confinement.

2. Garantir aux femmes un accès rapide aux services de santé sexuelle et génésique nécessaires et complets pendant la crise, tels que la contraception d’urgence, les services post-avortement et d’avortement sécurisé, et assurer la continuité des soins.

3. Veiller à ce que certaines cliniques de santé sexuelle et reproductive soient ouvertes pour offrir des services.

4. Donner aux jeunes les moyens d’accéder aux services de santé sexuelle et reproductive en temps de crise.

5. Veiller à ce que l’éducation sexuelle complète soit toujours accessible aux jeunes et que des liens avec des services sexuels et reproductifs adaptés aux adolescents et aux jeunes soient en place.

6. Assurer la non-interruption des services de santé pour les jeunes, en particulier les jeunes vivant avec le VIH (PVVIH) qui auront besoin de services de traitement tels que la recharge de médicaments antirétroviraux.

7. Étendre la réduction des taxes sur les biens et produits de base aux articles de santé menstruelle et aux contraceptifs.

[1] Source : Revue du secteur de la santé 2018 (MICS – EDS). [2] Source : Plan National de Devéloppement Sanitaire 2018-2022, p.28


Christ B





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